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Repositionnement du système de développement de l’ONU – Défis et opportunités pour l’UNESCO

Hubert Gijzen, Directeur et Représentant du Bureau régional pour l’Afrique australe

Suite à l’adoption par l’Assemblée générale de l’ONU de la résolution A/RES/72/279 du 31 mai 2018 et à la création de l’équipe de transition sous la direction de la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, la mise en œuvre de l’ambitieuse réforme du système de développement des Nations Unies va s’accélérer les prochains mois. Pour l’UNESCO, cela suppose de nouveaux défis et de nouvelles opportunités. Il est donc essentiel que le processus de Transformation stratégique lancé récemment lève un maximum d’obstacles et optimise les opportunités et les avantages potentiels résultant de cette réforme de l’ONU.

Parmi les difficultés figure la hausse substantielle des coûts pour créer un système des Coordinateurs résidents (CR[1]) renforcé et indépendant, estimés à 255 millions USD par an. Il faut aussi compter avec les propositions de rénovation de l’approche régionale, le renouvellement des équipes nationales des Nations Unies et les nouveaux PCAD[2], qui peuvent avoir des répercussions majeures sur le travail de l’UNESCO sur le terrain. 

L’Assemblée générale a approuvé la réforme de l’ONU, et demande à l’UNESCO de  repositionner clairement son travail au niveau national et régional. L’Organisation doit relever ce défi avec une marge de manœuvre très limitée en termes de ressources humaines et financières. En outre, l’UNESCO doit tenter de résorber la fracture existant à la fois entre les différents secteurs et entre le Siège et les bureaux hors Siège. Il faut aussi mener à terme la réforme des bureaux hors Siège qui a donné naissance à deux structures, une pour l’Afrique et une pour les autres régions.

En adoptant une approche intelligente, ces problèmes peuvent devenir des opportunités. Il faut mettre en évidence l’avantage comparatif de l’UNESCO  et mobiliser au mieux les ressources sous-exploitées. Pour conclure, je considère que quatre domaines méritent une attention particulière :

  1. Repositionner l’UNESCO, pour mieux occuper l’espace régional.

La résolution de l’Assemblée générale demande d’améliorer et de clarifier l’articulation, l’alignement et la coordination des rôles, fonctions et responsabilités des Groupes régionaux pour le développement durable des Nations Unies, des Commissions économiques régionales (CER) et autres entités régionales, notamment les Mécanismes de coordination régionale (RCM). La sphère de compétence régionale est actuellement mal établie par l’ONU, notamment en raison du manque de coordination entre les régions et de la priorité donnée aux interventions nationales dans le système de développement de l’ONU. Par conséquent, l’UNESCO a intérêt à développer des stratégies et des partenariats clairs au niveau régional, complétés par les Stratégies nationales de l’UNESCO[3] qui font le lien entre les programmes régionaux et les initiatives nationales. L’Organisation doit également améliorer le partage d’informations, des ressources, de l’expertise et des compétences entre les bureaux hors Siège et entre le Siège et le hors Siège.

  1. Une structure unifiée du hors Siège, alignée sur le modèle régional de l’ONU

La mise à jour de l’approche régionale, approuvée par l’Assemblée générale, constitue un défi pour l’UNESCO, car l’Organisation fonctionne actuellement avec deux structures de réseau hors Siège, dont aucun n’est véritablement aligné sur les réseaux régionaux des Nations Unies. Il est donc essentiel que l’UNESCO opère une convergence vers une structure unifiée du hors Siège, régi par des conditions et des fonctions communes à toutes les régions, et qui s’aligne sur l’ensemble du système des Nations Unies au niveau régional. Pour ce faire, il convient de désigner les directeurs régionaux influents comme membres du Groupe régional des Nations Unies pour le développement durable, en leur accordant des pouvoirs étendus. Ils pourront alors repositionner l’UNESCO comme un acteur régional important, au-delà des projets et programmes nationaux.

  1. Nouvelle approche programmatique pour accompagner les États membres dans la réalisation de l’Agenda 2030

L’Agenda 2030 et ses 17 ODD représentent un objectif complexe et ambitieux. Pour l’atteindre, les États membres demandent des conseils de qualité, le renforcement de leurs capacités ainsi que l’essai et la mise en oeuvre de  modèles sur le terrain. Les thématiques comme l’introduction des TIC dans l’éducation, les approches curriculaires pour l’Education au développement durable (EDD) et l’Education à la citoyenneté mondiale (ECM), la gestion innovante de l’eau par les approches de la chaîne de l’eau, la sauvegarde à long terme du patrimoine culturel par l’engagement des communautés et les liens entre les moyens de subsistance et d’appui, la réponse aux inégalités ou le positionnement des médias pour soutenir la mise en oeuvre des ODD requièrent toutes une approche concertée.

Les programmes de l’UNESCO doivent donc adopter un nouveau modèle : des projets phares d’ampleur régionale et nationale, avec des spécificités régionale, nationale et sous-nationale. Pour appliquer ce modèle, nous devons réduire l’écart entre le Siège et les bureaux hors Siège, à travers une claire division du travail et la formation d’équipes de projet comprenant des membres des bureaux hors Siège, des secteurs de programme et des services d’assistance. Ce modèle d’assistance programmatique aux États membres, au niveau national et régional, nécessite également une nouvelle approche de mobilisation des ressources et de développement de partenariats.

  1.  Mobiliser les richesses de l’UNESCO

Pour optimiser les effets et les opportunités émanant de la réforme du système de développement de l’ONU, l’UNESCO doit compenser le manque de fonds et de personnel par ses richesses, à savoir les réseaux et partenariats. Le moment est bien choisi pour revoir la Stratégie globale pour les partenariats, créée en 2013, et surtout pour élaborer un plan de mise en œuvre efficace.  Au cours des dernières décennies, l’UNESCO a tissé un ensemble de réseaux et de partenariats stratégiques très performant, notamment via les Programmes intergouvernementaux, les nombreux programmes de Chaires/UNITWIN, les centres de catégorie 2 et les réseaux professionnels. Toutes ces initiatives portent en elles un potentiel de coopération susceptible d’amplifier les capacités, l’impact et la visibilité de l’UNESCO. En outre, les Commissions nationales pour l’UNESCO, organes uniques dans la sphère de l’ONU, peuvent être un formidable outil de coordination et de promotion auprès des parties prenantes nationales et internationales, notamment les partenaires en développement, dans le but de sensibiliser et renforcer la position de l’UNESCO dans ses mandats.

Les quatre groupes de travail de la Transformation stratégique discutent en continu pour répondre au mieux aux défis et opportunités présentés ci-dessus. Il serait donc bénéfique d’établir un dialogue entre les différents groupes, car certaines thématiques sont intimement liées.

Le processus de la Transformation stratégique de l’UNESCO vient à point nommé. Dans un contexte en pleine évolution (réforme de l’ONU, mise en oeuvre de l’Agenda 2030), il va permettre d’amoindrir les difficultés et de tirer le meilleur des opportunités qui se présentent. L’objectif ultime est d’améliorer l’efficacité, l’impact et la visibilité de l’UNESCO, pour que les États membres puissent atteindre les ODD à l’échelle nationale, régionale et mondiale. Comme l’a déclaré le Secrétaire général A. Guterres récemment, « au final, la réforme vise à mettre en place les mécanismes qui permettront d’améliorer véritablement la vie des populations ».


[1] UN Resident Coordinator (RC)

[2] Le plan cadre des Nations Unies pour le développement (PCAD)

[3] UNESCO Country Strategy (UCS)

 

Les vues et opinions exprimées dans cet article sont celles de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique ou la position officielle de l'UNESCO.