Explorer les voies de la créativité au Maroc avec la Convention de 2005 de l'UNESCO
De la galerie Matisse à Marrakech à des événements musicaux de grande ampleur, tels que le Festival des musiques sacrées du monde et Visa for Music, la riche scène créative du Maroc a le potentiel de se développer et d'accroître son rôle à l'international.
Consciente de cette opportunité, la Convention de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles a d'ores et déjà soutenu les industries créatives par l'intermédiaire du Fonds international pour la diversité culturelle (FIDC). En 2015 et 2016, le Fonds cofinance un projet de l'ONG locale Racines dont l'objectif est d'élaborer des politiques efficaces pour la promotion du secteur culturel et artistique au Maroc.
Cela suppose notamment de développer la cartographie des industries artistiques en ligne (http://www.artmap.ma) d'étudier les pratiques culturelles et créatives les plus populaires dans le pays pour influencer les nouvelles politiques, de s'appuyer sur les résultats des premiers États Généraux de la Culture organisés en novembre 2014 et d'en préparer la deuxième édition qui se tiendra en novembre 2016.
Plus récemment, l'UNESCO a collaboré directement avec le ministère de la Culture du Maroc pour renforcer la préparation de son rapport périodique sur la mise en œuvre de la Convention de 2005, que le pays a ratifiée en 2013.
Lancé le 29 février dernier par le ministre de la Culture, M. Mohammed Amine Sbihi ; l'ambassadrice de Suède au Maroc, S.E. Erika Ferrer ; et le représentant de l'UNESCO à Rabat, Michael Millward, ce projet vise à renforcer les compétences et les connaissances relatives à la Convention afin de favoriser l'élaboration de politiques culturelles. Une réunion de consultation à Rabat le 11 mai et un atelier de trois jours dans la ville artistique d'Asilah du 13 au 15 mai ont permis à des artistes, des musiciens et des professionnels du théâtre, ainsi qu'à des acteurs majeurs de la société civile et des représentants des principales institutions du secteur de la création, de s'interroger sur les politiques futures à mener. Le gouvernement était représenté par les ministères de la Culture, du Commerce, de l'Enseignement supérieur et de la Communication, entre autres, témoignant ainsi d’une volonté affirmée de placer la créativité au service des politiques de développement du pays.
« Le dialogue et la coopération entre le ministère de la Culture, d'autres ministères et la société civile sont essentiels pour que le rapport périodique du Maroc rende fidèlement compte des activités menées actuellement pour promouvoir la diversité des expressions culturelles », affirme Fatima Ait Mhand, Chef du service de la coopération internationale au ministère de la Culture. Lors de l'atelier, Othman Nejmeddine, l'un des directeurs du festival Visa for Music, a déclaré : «Grâce à cette formation et aux connaissances acquises sur les politiques et les pratiques culturelles, je comprends comment améliorer mon travail pour mieux en tirer profit.»
En 2013, les exportations de biens culturels marocains ont représenté 34 millions d'USD, et les experts de la culture s'attendent à ce que l’engouement international pour la musique et l'art visuel marocains continue de progresser, faisant ainsi écho à la stratégie mise en œuvre pour favoriser le développement économique et humain dans le pays.
Michael Millward, le représentant de l'UNESCO, a souligné que le développement réussi et durable des industries créatives nécessitait une collaboration étroite entre les responsables gouvernementaux et les membres de la société civile représentant les professionnels de la création. Jordi Baltà Portolés et Christine M. Merkel, experts internationaux et membres de la Banque d'expertise de l'UNESCO, ont montré de quelle manière les experts de la culture et des artistes pouvaient travailler ensemble pour optimiser les mécanismes de suivi de mise en œuvre de la Convention de 2005.
« Nous avons constaté que le Maroc a pris des mesures pour élargir l'accès et la portée d'expressions culturelles diverses, en adoptant différentes langues pour les professions créatives du pays », a expliqué Jordi Baltà Portolés, soulignant que « la Convention de 2005 sert également à sensibiliser à l'importance de la culture pour le développement durable, et à montrer comment de nombreux acteurs peuvent y contribuer. »
Le marché de la musique au Maroc étant estimé à 54 millions d'USD – soit 0,16 % du PIB, (Rapport sur les industries créatives au Maroc), les experts présents lors de l'atelier ont affirmé que le pays pouvait davantage tirer profit de ses industries créatives en améliorant la circulation de ses biens et services culturels afin de toucher l'ensemble des marchés internationaux. Non seulement ce serait bénéfique pour les économies locales au Maroc, mais cela permettrait aussi aux professionnels de la création de stimuler le développement des communautés dans ce pays où près de 6,3 millions de personnes vivent dans la pauvreté. Les participants à l'atelier ont reconnu que le festival Visa for Music, dont la renommée est internationale, était un important vecteur de progrès social et économique. Cette manifestation est aujourd'hui devenue une plateforme de dialogue entre les principaux acteurs pour améliorer les politiques culturelles, avec des séminaires et des conférences visant à renforcer l'importance des industries créatives et à faire entendre la voix des artistes. La prochaine édition aura lieu en novembre 2016.
« Ensemble, nous pouvons mettre en place des flux plus équilibrés de biens culturels, ainsi que de nouvelles plateformes pour des réunions et des échanges qui seront à l'avenir les piliers de notre diversité culturelle », souligne Brahim El Mazned, Directeur du festival Visa for Music, qui promeut les artistes d'Afrique et du Moyen-Orient.
Le soutien direct et innovant apporté par le ministère de la Culture aux éditeurs et aux libraires, de même que l'aide fournie pour la traduction et pour la participation à des salons internationaux du livre, ont été présentés comme certaines des mesures innovantes à illustrer dans le premier rapport périodique, qui doit être remis en 2017.
Selon les données du ministère de l'Industrie et du Commerce, le chiffre d'affaires de l'industrie de l'édition et de l'imprimerie est passé de 2,2 milliards de dirhams (environ 253 millions d'USD) en 2002 à 3,054 milliards de dirhams en 2007 (environ 312 millions d'USD). D'après les estimations nationales, ce secteur représentait 1,8 % des emplois dans l'industrie en 2002 (Rapport sur les industries créatives au Maroc).
Le secteur audiovisuel progresse tout aussi rapidement : en 2005, les recettes de chaque entreprise étaient comprises entre 200 000 USD et 5 millions d'USD, pour un total estimé entre 20 et 30 millions d'USD par an (étude de l'ASESA, Association des entreprises du secteur audiovisuel – Industries créatives du Maroc).
Ces discussions au sujet de la Convention de 2005 s’inscrivent dans le cadre d’une série d'ateliers organisés grâce au soutien financier de l'Agence suédoise de coopération internationale pour le développement (ASDI). L'objectif de ce projet est de fournir aux experts de la culture, aux représentants du gouvernement et aux artistes marocains des connaissances sur l'élaboration de politiques culturelles qui auront un effet durable sur le développement de leur pays. « Cette Convention sur la diversité des expressions culturelles est un trésor caché. Elle incite à mettre en place une coopération entre les secteurs et les parties prenantes pour donner un élan durable à ce secteur dynamique », fait remarquer l'experte internationale Christine M. Merkel.
« Le premier rapport périodique est une excellente occasion de mettre en contact des acteurs qui n'avaient pas communiqué jusqu'à présent. L'atelier d'Asilah a encouragé les participants à envisager leurs activités dans la perspective plus large de l'élaboration des politiques », a-t-elle ajouté.
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Informations complémentaires : http://fr.unesco.org/creativity/projet-sur-renforcement-des-capacites-en-matiere-detablissement-de-rapports-periodiques-dans-cadre