Journée internationale de la fin de l'impunité pour les crimes commis contre les journalistes 2017
A propos de la journée internationale de la fin de l’impunité
Lors de sa 68ème session, en 2013, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté la Résolution A/RES/68/163, qui proclame le 2 novembre « Journée Internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre les journalistes ». Cette résolution exhorte les Etats Membres à mettre en place des mesures précises afin de lutter contre l’actuelle culture d’impunité. La date a été choisie en mémoire de l’assassinat de deux journalistes français au Mali le 2 novembre 2013.
Cette résolution historique condamne l’ensemble des attaques et des violences perpétrées contre les journalistes et agents des médias. Elle exhorte également les Etats Membres à faire tout leur possible pour prévenir cette violence contre les journalistes et les agents des médias, afin de garantir que les auteurs de ces crimes soient reconnus comme responsables et soient traduits en justice, et afin de garantir une possibilité de recours pour les victimes. Elle demande par ailleurs aux Etats de promouvoir un environnement sûr et propice à l’exercice du métier de journaliste afin que ceux-ci puissent exercer leur profession de façon indépendante et sans ingérence inappropriée.
L’accent porté par cette résolution sur l’impunité découle de la situation inquiétante de ces onze dernières années au cours desquelles près de 1 000 journalistes ont été tués pour avoir voulu couvrir des évènements et informer le public. En 2016 seulement, la Directrice Générale de l’UNESCO a condamné le meurtre de 102 journalistes, agents des médias et acteurs sur réseaux sociaux d’intérêt public. En 2012, année la plus meurtrière pour les journalistes, 124 cas ont été condamnés.
Ces chiffres n’incluent pas les nombreux autres journalistes qui, quotidiennement, subissent des agressions non fatales, dont notamment la torture, la disparition forcée, la détention arbitraire, l’intimidation et le harcèlement, que ce soit en situation de conflit ou non. En outre, il existe pour les femmes journalistes des risques spécifiques, notamment d’agressions sexuelles.
Il est inquiétant que moins d’un cas sur dix de crimes commis contre des professionnels des médias pendant la dernière décennie a abouti à une condamnation. Cette impunité non seulement enhardit les criminels, mais aussi décourage la société, y compris les journalistes eux-mêmes. L’impunité favorise l’impunité et alimente un cercle vicieux.
Le 17 novembre de cette année, les 39 Etats Membres du Conseil intergouvernemental de l’UNESCO pour le Programme international pour le développement de la communication (PIDC) recevront le rapport biannuel de la Directrice générale de l’UNESCO sur la sécurité des journalistes et le danger de l'impunité. Le rapport offre une vue générale sur les assassinats de journalistes condamnés par la Directrice générale de l'UNESCO entre 2014 et 2015, soit 98 cas en 2014 et 115 en 2015. Le rapport comprendra également des informations récentes sur les réponses des États membres reçues par la Directrice générale sur l’état des enquêtes judiciaires relatives aux meurtres commis entre 2006 et 2015.
Selon le Rapport de 2016 de la Directrice générale sur la sécurité des journalistes et le danger de l’impunité, 8 % des 827 affaires d’assassinat de journalistes recensés entre 2006 et 2015 ont été résolues. Moins d’un quart de ces affaires sont considérées comme « en cours », les enquêtes correspondantes se situant aux différents stades du processus judiciaire. Dans 51 % des cas, il n’a été communiqué à l’UNESCO aucune information sur la procédure judiciaire, malgré les demandes formulées par la Directrice générale.
Lorsqu’elles restent impunies, les agressions de journalistes envoient au grand public un message très négatif selon lequel la diffusion d’une « vérité embarrassante » ou d’une « opinion indésirable » serait synonyme de représailles. En outre, la société perd confiance dans son propre système judiciaire, censé défendre les droits de chacun. Les auteurs de crimes contre des journalistes s’enhardissent donc lorsqu’ils se rendent compte qu’ils peuvent agresser leurs cibles sans jamais être traduits en justice.
La société tout entière pâtit de cette impunité. Le genre d’information qui est « passé sous silence » est exactement le genre d’information dont le public a besoin. L’information, qu’elle soit économique, sociale ou politique, est essentielle pour prendre des décisions optimales. Cet accès à une information fiable et de qualité est la pierre angulaire de la démocratie, de la bonne gouvernance et des institutions efficaces.
La Journée internationale offre à toutes les parties prenantes une occasion stratégique d’attirer l’attention du public sur l’importance de mettre fin à l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes. Elle offre également de nouvelles possibilités à exploiter dans les circonscriptions dont les principaux intérêts peuvent être autres que la sécurité des journalistes. Par exemple, étant donné l’importance symbolique des journalistes quant à la question plus large de l’impunité et de la justice, tous ceux qui œuvrent à la primauté du droit, tels les juristes et les magistrats, peuvent être sollicités. Ceux qui sont concernés par la participation du public et le droit des citoyens à s’exprimer sur diverses questions telles que la corruption ou la violence domestique, pourront également souhaiter aider à combattre l’impunité des attaques contre des journalistes qui, par définition, sont des acteurs sur la scène publique, et dont la situation envoie un signal à l’ensemble de la société.
De manière significative, 16 points de la Déclaration de Jakarta sur la liberté de la presse concernent la sécurité des journalistes. La Déclaration a été adoptée par 1 500 participants lors de la célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse à Jakarta, Indonésie (1-4 mai 2017). La Déclaration « condamne toutes les formes de violence, d’agression et d’intimidation à l’encontre des journalistes et reconnait en particulier les menaces spécifiques auxquelles font face les femmes journalistes, y compris le harcèlement sexuel. Elle souligne également « l’importance, pour la vie démocratique, citoyenne et politique, de l’existence d’une presse de qualité au service de l’intérêt public, et notamment d’un journalisme d’investigation, qui respecte les normes professionnelles et déontologiques et qui bénéficie de la protection de la confidentialité de ses sources, et reconnait qu’une telle presse constitue un bien public pour tous les membres de la société ».
C’est dans la reconnaissance des conséquences si profondes de l’impunité, en particulier des crimes contre les journalistes, que les Nations Unies ont déclaré le 2 Novembre Journée internationale contre l'impunité pour les crimes contre les journalistes (IDEI). Cette journée revêt donc une grande importance pour les organismes des Nations Unies, les gouvernements, les médias et la société civile ainsi que pour de nouveaux acteurs potentiels dans un domaine où, jusqu’à présent, il n’y a pas eu d’occasion de traiter les problèmes de manière synergique. Celle-ci contribue également à la réalisation du nouvel Agenda 2030 des Nations Unies pour le développement durable, et en particulier à l’accomplissement de l'objectif de développement durable (SDG) 16, favorisant la promotion des sociétés justes, pacifiques et inclusives, et qui comprend les points principaux concernant la liberté de la presse, l'accès à l'information, la sécurité des journalistes et l’Etat de droit.
De son côté, l’UNESCO collaborera avec tous ses bureaux régionaux et l’ensemble de ses partenaires, pour assurer le succès de cette occasion spéciale qui pourra faire la différence.